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Livres : De l’Équitation par Xenophon / quote

De l’Équitation (Περὶ ἱππικῆς, peri hippikēs) a été écrit par Xenophon vers l’an 350 avant notre ère. Cet ouvrage est connu pour être le premier écrit traitant des chevaux, de leurs sélections, des soins et de l’entraînement. Un texte lui est plus ancien (rédigé par Kikkuli du royaume de Mittani) mais n’a pas la prétention d’être aussi complet.

Il est très intéressant de noter que la plupart des principes majeurs de l’équitation éthologique étaient déjà connus il y a plus de deux mille ans en Grèce et sur tout le pourtour méditérrannéen. En effet, le philosophe Xenophon mentionne clairement les concepts suivant :

  • Désensibilisation ;
  • Gentillesse et patience ;
  • Timing et harmonie avec le cheval ;
  • Diversité de l’entraînement ;
  • Compliquer les mauvaises actions, faciliter les bonnes ;
  • Enseigner le soft feel et éviter les gadgets ;
  • Récompenser la moindre tentative.
Sources: livre De l'Équitation par Xenophon

Désensibilisation

Ordonnez aussi au palefrenier [d’approcher le poulain] de toutes sortes de spectacles et de toutes sortes de bruits, et, s’il en a peur, ce n’est pas en le rudoyant, mais en le traitant par la douceur, qu’on lui apprendra qu’il n’en a rien à craindre.
(Chapitre II)
Notez que l’auteur insiste sur la notion de douceur.

Gentillesse et patience

Il ne faut jamais traiter un cheval avec colère : c’est le premier précepte et la meilleure habitude qu’on puisse donner à un cavalier. La colère en effet ne prévoit rien et fait souvent faire des choses dont il faudra se repentir.
(Chapitre VI)
Il s’agit là probablement de la leçon la plus importante donnée par Xenophon, car cela concerne bien sûr notre attitude vis-à-vis des chevaux, mais aussi d’autrui.

Timing et harmonie avec les chevaux

Et, comme il est bien porté de partir du pied gauche, le plus sûr, pour y réussir, c’est, quand le cheval est au trot, de saisir l’instant où il lève le pied droit, pour lui signifier le galop ; car s’il est sur le point de lever le pied gauche, il commencera par le pied gauche, et, aussitôt qu’on le tournera à gauche, il se mettra immédiatement à galoper.
(Chapitre VII)
C’est ce que Ray Hunt décrivait dans son livre Think in Harmony with Horses et l’essentiel de la réponse de Buck Brannaman lorsque je lui demandai comment enseigner le bon appel de pied au cheval : ressentir son rythme et demander un galop juste avant que le pied gauche quitte le sol, et vice-versa pour le galop droit.

Diversité de l’entraînement

Il est bien aussi de faire ses exercices tantôt dans un endroit, tantôt dans un autre, et tantôt de les abréger, tantôt de les allonger ; c’est moins fastidieux pour le cheval que de travailler toujours au même endroit et de la même manière.
(Chapitre VIII)
Tous les entraîneurs et propriétaires de chevaux devraient réfléchir à cette sentence alors qu’ils sortent leur animal d’un box de 9 m² pour une séance de deux heures à la longe avant de les renfermer à nouveau dans leur boîte.

Compliquer le mauvais comportement, faciliter le bon

Mais si vous le récompensez, quand il se comporte comme vous le voulez, et, si vous le punissez, quand il désobéit, il apprendra fort bien ainsi à faire son service.
(Chapitre VIII)
Xenophon ne décrit pas le type de récompense ou comment punir le cheval, mais il insiste clairement sur le fait qu’il faille “le pratiquer tant qu’on fait de l’équitation.”

Enseigner le Soft Feel et éviter les gadgets

il faut s’abstenir de lui tirer la bouche avec le frein et d’user de l’éperon et du fouet, moyens par lesquels la plupart des gens s’imaginent faire briller un cheval ; en réalité l’effet qu’ils produisent est tout le contraire de celui qu’ils attendent.

Il ne faut pas tirer la bouche d’un cheval trop rudement : il détournerait la tête […] mais, dès que tiré en arrière, il lève le cou, il faut aussitôt lui rendre la main.
(Chapitre X)
Ces deux citations expriment clairement le point de vue de Xenophon sur l’abondance de gadgets qui encombrent les rayons de nos magasins spécialisés : martingales, rênes allemandes, muserolle, etc.

Le soft feel tel qu’il est appellé par Buck Brannaman est la seule méthode douce permettant d’amener un cheval à être bien engagé.

Les principes équestres de la Grèce antique prévient qu'il ne faut pas tirer rudement sur les rênes
Récompenser la moindre tentative

Et en toutes circonstances, nous ne cessons de le dire, il faut […] récompenser [le cheval], s’il fait bien son service.
(Chapitre X)
la meilleure manière de l’instruire, […] c’est que, toutes les fois qu’il s’est plié à la volonté du cavalier, il obtienne toujours de lui un instant de relâche.
(Chapitre XI)

De plus, nous pouvons aussi noter une réflexion au sujet de l’entretien des sabots qui saura plaire aux partisans du naturel : “Une écurie humide et unie gâte même les sabots bien conformés“. Ainsi qu’une considération sur la briderie : “Les mors doux leur conviennent mieux que les durs,” ajoutant à cela que s’il nous faut utiliser un mors plus dur, il est de notre devoir de compenser, qu’il “faut le rendre doux par la légèreté de la main.

A contrario, l’on peut aussi lire des propos contradictoires sous la plume du philosophe qui conseille “qu’un homme prenne un fouet ou une baguette et l’en cingle aussi vigoureusement que possible” ou “qu’il le pique de l’éperon“. Il faut cependant relativiser les propos et les remettre dans leur contexte : nous sommes quelques siècles avant notre ère et l’auteur s’adresse à des soldats qui entraînent leurs chevaux au combat.

Car, comme le dit Simon, dans ce qu’il fait malgré lui, le cheval ne met pas plus d’intelligence ni de grâce qu’un danseur qu’on fustigerait ou piquerait de l’aiguillon.

Livres : De l’Équitation, Xenophon

Equitation en Grèce antique
Pour conclure mon commentaire du livre du philosophe, je souhaite insister sur le fait que toutes les bases d’une approche douce et respectueuse du cheval étaient déjà connues et pratiquées par d’importants hommes de chevaux il y a deux millénaires.

Gardez bien cela à l’esprit lorsque vous rencontrerez un de ces prétendus “nouveaux maîtres” qui vous racontera qu’il a découvert ou inventé une nouvelle méthode, de nouveaux concepts d’équitation… soit il ment, soit il ne sait pas de quoi il parle : je ne sais pas lequel de ces deux maux est le pire lorsque l’on vient à passer du temps avec les chevaux.

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