J’ai eu l’occasion de vous parler de parage naturel dans cet article et d’expliquer comment cela m’a permis d’aider un poney fourbé à marcher de nouveau correctement.

Le temps passant, l’on m’a confié deux cas graves de fourbure, au point que les maréchaux-ferrants avaient abandonné tout espoir et que leurs vétérinaires respectifs les avaient tous deux condamnés à l’abattoir ! Je ne rédige pas cet article dans l’objectif de vous convaincre que le parage naturel peut sauver tous les chevaux. Cependant, j’espère pouvoir ouvrir les yeux et les esprits de tous à l’idée qu’il faille d’abord essayer le parage naturel avant la condamnation à mort… ce sont des centaines, peut-être des milliers de chevaux qui pourraient être sauvés tous les ans dans le monde si le milieu équestre acceptait l’idée que parfois le parage naturel peut aider !

Dakota, le cheval à qui l’on a offert une seconde vie

En 2015, j’ai eu l’opportunité de m’occuper d’une jument, Samba sur laquelle je reviendrai un peu plus loin dans cet article, qui était atteinte d’une fourbure aiguë. Sa propriétaire m’a présenté à une dame alors désespérée au sujet de son propre cheval : Dakota.

Lui aussi était victime d’une fourbure très avancée. L’on m’a alors expliqué que le vétérinaire avait déjà conseillé d’abattre le cheval dès que possible afin d’abréger ses souffrances. Le maréchal-ferrant avait fait tout ce qu’il pouvait et Dakota était alors équipé de fers thérapeutiques. Suite aux heures que j’ai passées à lire et étudier Pete Ramey, ainsi qu’aux semaines passées à parer des douzaines de chevaux victimes de problèmes divers et variés (et bien que je ne me considère pas du tout comme un spécialiste), j’en savais suffisamment pour penser que Dakota avait toutes ses chances. Bien entendu, cela ne se ferait pas en deux semaines et demanderait beaucoup d’attention et de soins de la part de ses propriétaires, mais j’étais persuadé qu’il pouvait guérir.

Les deux antérieurs de Dakota étaient déformés par la fourbure : une déviation de 18 % à droite et 17 % à gauche. Le 2 mai 2016, lorsque je le rencontrais pour la deuxième fois, et pour son premier parage, le simple fait de marcher sur du béton semblait être un enfer pour lui. J’avais rendez-vous avec le maréchal-ferrant afin qu’il lui ôte les fers et j’ai pris les photographies suivantes :

2 mai, Antérieur gauche
Face

2 mai, Antérieur gauche
Côté

2 mai, Antérieur droit
Face

2 mai, Antérieur droit
Côté

2 mai, Antérieur droit
Sole

Comme vous pouvez le constater, l’approche classique consiste à clouer une plaque d’acier sous le sabot et, en gros, de couper tout ce qui dépasse. Il manquait à Dakota tout un morceau de la paroi du sabot antérieur droit. La raison invoquée étant de faire baisser la pression.

En appliquant les instructions de Pete Ramey, j’ai pu aider les sabots à pousser de nouveau correctement. Après cinq mois de parages réguliers (environ une fois toutes les trois semaines), les deux sabots avaient déjà meilleure mine. Dakota ne boîtait plus et pouvait de nouveau marcher sur le béton tout à fait normalement :

8 octobre, Antérieur gauche
Face

8 octobre, Antérieur gauche
Côté

8 octobre, Antérieur gauche
Sole

8 octobre, Antérieur droit
Face

8 octobre, Antérieur droit
Côté

8 octobre, Antérieur droit
Sole

Cela nous a pris encore six mois supplémentaires pour arriver à un résultat viable. Les sabots avaient recouvré une forme naturelle et saine, Dakota se sentait mieux et avait pu reprendre le travail au sol aux trois allures :

2 mars, Antérieur gauche
Face

2 mars, Antérieur gauche
Côté

2 mars, Antérieur gauche
Sole

2 mars, Antérieur droit
Face

2 mars, Antérieur droit
Côté

2 mars, Antérieur droit
Sole

Enfin, après avoir expliqué la routine de parage à un jeune maréchal-ferrant, ouvert d’esprit et intéressé, Dakota a pu se débarrasser de la fourbure. L’angle s’était corrigé jusqu’à 5 % à droite et seulement 2.4 % à gauche !
J’ai aussi appris plus tard qu’il était de nouveau monté dès l’été 2017 et pouvait de nouveau profiter de la vie en compagnie de sa propriétaire…

Samba, vivre avec la fourbure

Cette jument souffrait de fourbure chronique depuis longtemps lorsque je l’ai rencontrée pour la première fois. Même conclusion que pour Dakota, pourtant pas le même vétérinaire : il était temps de mettre fin à ses jours, pour son bien…

Même si j’avais quelques doutes sur le résultat final, après discussion avec sa propriétaire, nous avons décidé de lui laisser sa chance à elle aussi : avec le parage naturel ! J’ai commencé en novembre 2015. A cette époque, la jument était régulièrement sous sédatifs afin de réduire l’intensité de la douleur et lui permettre de marcher péniblement. Les deux antérieurs étaient touchés, mais le pied gauche était de loin le plus déformé :

13 novembre 2015
Face

13 novembre 2015
Côté

13 novembre 2015
Sole

7 mai 2016
Face

7 mai 2016
Côté

7 mai 2016
Sole

11 mars 2017
Face

11 mars 2017
Côté

11 mars 2017
Sole

Après un peu moins d’un an et demi de parages réguliers, la situation s’était améliorée. Samba n’avait plus besoin de médicaments et pouvait marcher correctement, cependant ses sabots avaient été sévèrement endommagés et il était très compliqué de faire pousser un sabot tout à fait sain. Dans le cas de Samba, le parage naturel a été une solution efficace pour réduire drastiquement la douleur, pour l’aider à marcher correctement de nouveau et lui permettre de vivre une retraite “normale”. Mais, dans les limites de mes capacités en tout cas, il ne lui était pas possible de guérir complètement.

* * *

Comme vous pouvez le constater, de nombreux chevaux pourraient se sortir de la fourbure, mais ce serait mentir que de vous dire que l’on pourrait tous les sauver. Certains, si le diagnostic est tardif ou que le parage n’est pas fait correctement ou à temps, auront peut-être à vivre avec la fourbure. Une minorité se verra malheureusement condamnée.

Premièrement, je conseille à tous les propriétaires de chevaux de faire attention au type de vie qu’ils offrent à leurs compagnons :

• même si c’est gentil de vouloir protéger son cheval de l’adversité du monde extérieur, vous ne devriez pas l’enfermer dans un box à longeur de journées… ils ont besoin de marcher, beaucoup ! Le mouvement est la meilleure prévention à la fourbure car cela permet d’activer les tissus internes ;
• même si c’est gentil de vouloir protéger les pieds de son cheval, vous ne devriez pas lui clouer de la ferraille sous les sabots… c’est une forme de torture si vous prenez le temps d’y penser et 95 % de nos chevaux ne font pas suffisamment d’activités sur le béton pour avoir besoin d’une telle protection ! Les sabots doivent rester libres afin de se mouvoir au fil des déplacements du cheval, c’est ce qui aide à la circulation sanguine et l’oxygénation des pattes ;
• même si c’est gentil de vouloir gâter son cheval à coups de carottes et de pommes, de sucres et de biscuits, de céréales et de friandises, vous ne devriez pas lui donner autre chose que du foin et de l’herbe (sèche et rare, pas verte, grasse et abondante)… les chevaux ne sont pas des humains et leur système digestif ne fonctionne pas comme le nôtre ! S’il-vous plaît, prenez le temps de lire au sujet de leur habitat naturel, de leurs habitudes alimentaires, afin de respecter leur digestion. Une prise trop importante de glucides, par exemple, peut complètement déséquilibrer la digestion et avoir des conséquences désastreuses sur leur santé.

Deuxièmement, dès que vous suspectez un cas de fourbure (pour faire simple, dès que vous constatez une déviation de la ligne de pousse des sabots), je vous invite à consulter un spécialiste en parage naturel qui saura aider le cheval à refaire des sabots sains. N’attendez pas qu’il soit trop tard !